La Création du Monde : texte du Rig Veda
Il s'agit de montrer que toutes choses en ce monde et dans l'autre sont des émanations de Prajâpati et donc que les diverses activités humaines y compris la connaissance mystique et les rites constituent un hommage au Dieu unique, à la fois immanent à l'univers et le transcendant.
L'hymne ( qui comprend de nombreux emprunts à divers autres textes védique s) s'achéve par une priére à Agni, de qui l'on attend, en grâce, la sagesse (cf. aussi Isha Upanisad ).
Pour les hindouistes, le Rig-Veda n’a pas été écrit par les Hommes. Il existe de toute éternité et il est révélé aux Hommes au début de chaque cycle. La datation des hymnes qui le composent n’est pas moins difficile car ces textes sont rédigés en un sanskrit très archaïque qui amène à penser qu’il fut composé vers le début du IIe millénaire, même si certains passage semble être encore antérieurs. La compilation, telle qu’elle est connue aujourd’hui a dû être mise en oeuvre vers l’an 1000, car l’ensemble était déjà complet au moment de l’apparition du bouddhisme (VIe s.).
O Grand Homme ! Nous chantons la prière de Brihaspati, le précepteur des Dieux, pour la joie de ce qu'il nous enseigne et le succes qui préside à toutes nos actions de bonté. Il est le Vénérable et le plus grand. Ses désirs doivent être exhausés ainsi, nous gagnerons la force spirituelle qui nous permettra de marcher sur ses traces. ( traduction du texte sanscrit de l'illustration ).
Taittiriya Âranyaka 10.1
En l’onde sans limite, au centre de l'Univers,
sur le dos du firmament, plus grand que le grand,
ayant de sa splendeur pénétré les Lumiéres,
Prajâpati dans l'Embryon s'active.
Ce en quoi tout ici-bas s'assemble et se disperse,
ce sur quoi Tous les Dieux ont eu leur assise,
c'est Cela, qui était, ce qui fut, ce qui sera :
Cela même, dans l'impérissable, le suprême firmament.
Ce dont furent emplis l'espace, et le Ciel, et la Terre ;
ce par quoi chauffe le soleil, de son éclat, de sa lumière ;
ce que tissent les Poétes[1] au fond de l'océan :
c'est Cela dans l'impérissable, le suprême firmament.
Ce par quoi fut incitée l'incitation du monde,
qui par les eaux propagea les vivants sur la terre,
ce qui par les plantes pénétra hommes et animaux,
tous les êtres qui se meuvent sans cesse...
Rien autre n'est plus grand que Cela, ni plus intime ;
Plus haut que le haut, plus grand que le grand,
ce Mystére Unique, non manifesté, qui a pour forme l'illimité,
le Tout, l'Ancien d'au-delá les ténébres :
C'est Cela qui, a-t-on dit, est l'Ordre et la Vérité,
le suprêm brahman des Poétes !
Offrandes et dons, tout ce qui naît ou naquit...
nombril de l'Univers, Cela soutient toutes choses !
Cela en vérité, est Agni et V'â'yu,
Cela est le Soleil et la Lune,
Cela est l'Ambroisie resplendissante,
et le Brahman, et l'Onde et Prajâpati !
Les divisions du temps sont toutes nées
de l'Etre, qui est éclair
les secondes, les minutes, les heures,
les jours et les nuits, tous sans exception.
Celui qui ordonna : « Que s'agencent les quinzaines,
Les mois, les saisons, l'Année ! ».
C'est celui qui trait les Eaux
ainsi que l'espace médian et le Ciel.
On ne saurait le saisir, ni par-dessus,
ni de biais, ni par le milieu;
personne ne le régit ;
son nom est : Grande Gloire !
Sa forme n'est pas dans le domaine de la vue :
nul donc ne le verra de ses yeux
on l'informe par le coeur, par la pensée, par l'esprit :
ceux qui le connaissent deviennent immortels.
C'est á partir de l'Onde et du suc de la Terre qu'il s'est développé ;
C'est de Vishvakarman qu'il a tiré son origine ;
Tvastar dispose sa forme : voila, l'universelle
naissance du Purusa, au commencement.
Quant à moi, je le connais ce Puru§sh majestueux :
couleur de soleil, il vient d'au-delà des ténébres !
A le connaître ainsi on gagne l'immortalité,
il n'y a pas d'autre chemin pour y aller.
Prajâpati dans l'embryon s'active ;
inengendré, il naît et se diffuse de multiple façon ;
les sages comprennent son origine,
ceux qui savent cherchent le lieu de ses rayons.
Il rayonne pour les Dieux ;
des Dieux il est le chapelain ;
il est-né avant les Dieux :
hommage á la lumiére sacrée !
Engendrant cette lumiére sacrée,
les Dieux, au commencement, -déclarérent
« Les Dieux seront soumis au brahmane
qui saura ainsi. »
Beauté et Bonheur sont tes deux épouses ;
le Jour et la Nuit sont tes deux flancs,
les constellations sont ta forme
et les Ashvin ta bouche !
Envoie-moi vers le monde que je désire !
Envoie-moi vers ce monde-là !
Envoie-moi vers Tout !
Embryon d'or, au commencement il se développa
sitôt né, il fut le maître unique de l'univers.
Lui qui fixa la Terre, le Ciel aussi : ce Dieu,
qui est-il que nous l'honorions d'une oblation ?
Lui qui, par sa majesté, devint l'unique roi du monde,
et de tout ce qui respire, et de tout ce qui sommeille ;
ce Dieu qui régit hommes et bêtes,
qui est-il que nous l'honorions d'une oblation ?
Ce Dieu qui donne l'Ame, qui donne la force,
lui dont tous les ìtres, mìme les Dieux, respectent la parole,
lui de qui la Vie et la Mort ne sont que l'ombre,
qui est-il, ce Dieu, que nous l'honorions d'une oblation ?
Lui qui, par sa grandeur, régne sur ces montagnes,
sur l'Océan et la riviére Rasa, a-t-on dit ;
ce Dieu dont les bras sont les quartiers du ciel,
qui est-il que nous l'honorions d'une oblation ?
Ce Dieu que regardent pour qu'il les aide
les deux masses tremblantes en leur esprit,
ce Dieu qui est là où resplendit le Soleil levant,
qui est-il que nous l'honorions d'une oblation ?
Ce Dieu par qui le Ciel robuste et la Terre furent fixés,
Par qui fut étayé le Soleil, étayée la Voûte Céleste,
ce Dieu qui dans l'espace médian mesure l'étendue,
qui est-il que nous l'honorions d'une oblation ?
Lorsque vinrent les Hautes Eaux
recevant l'Intelligence, engendrant Agni
il en émana, unique principe de vie des Dieux :
qui est-il que nous l'honorions d'une oblation ?
Lui qui, par sa puissance, embrassait du regard les Eaux
qui recevaient l'Intelligence et engendraient Agni,
ce Dieu qui, parmi les Dieux, était l'Unique,
qui est-il que nous l'honorions d'une oblation
C'est le Dieu qui parcourt tous les espaces,
c'est celui, qui, à l'intérieur du germe, naquit le premier ;
c'est celui qui naît et se diffuse, c'est celui qui naîtra ;
son visage est tourné vers l'arrière,
son visage est tourné vers toutes les directions.
Il regarde de tous côtés, il fait face de toutes parts ;
Sa main agit partout, partout son pied
travaillant de ses deux bras, s'aidant des ailes du souffle
Il ajuste l'un à l'autre le Ciel et la Terre,
les engendrant lui, l'unique, le divin artisan.
Il est le Vena qui voit tous les êtres, sachant
où toutes choses ont leur nid commun
lui en qui ce monde unique se fait et se défait,
il est celui qui se diffuse, tissé dans les êtres.
Veuille le Gandharva qui connaît l'Ambroisie,
révéler le nom déposé dans le secret !
« trois mots » ont été déposés dans le secret !
qui sait cela devient le pére du Soleil !
Il est notre lien de parenté, notre père, notre répartiteur il
connaît toutes les fonctions, tous les êtres ;
il sait le lieu où les Dieux, dans le troisième monde,
ayant goûté à l'Ambroisie, gagnérent leurs fonctions.
D'un coup, l'on parcout le Ciel, la Terre, les trois mondes,
les quartiers du ciel et le séjour de lumière
ayant dénoué le tissage de l'Ordre, ayant vu Ce Mystère,
on devient Ce Mystère, présent en toutes les créatures.
Oui, ayant parcouru les mondes,
les êtres, tous les quartiers,
Prajâpati, le premier-né de l'Ordre
est devenu, de lui-même, l'Ame du monde.
Au maître secret de la place,
à l'ami. chéri d'Indra,
j'ai demandé ce gain, la sagesse !
Dresse ta flamme, Agni !
Ecartant de moi la Néantise,
améne-moi du bétail, et de quoi vivre,
montre-moi les orients !
Que, grâce à ton assistance, Agni,
personne ne nuise á nos vaches, á nos chevaux, à nos hommes !
Viens á moi, Agni ! toi qui apportes la lumiére !
Enveloppe-moi de ton éclat !

[1] Dans la tradition du Veda les poêtes sont les maîtres de la Parole, ce sont eux qui participe à la diffusion donc, la Création leur appartient.